Une maison pour tous…

Une maison pour tous…

« Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël. » De tels propos sur les lèvres de Jésus ont pu jeter le trouble dans le cœur de ses auditeurs.

Un jour, j’ai eu un entretien avec un éminent intellectuel africain. Nous partagions un bon repas et l’occasion était favorable à des échanges à bâtons rompus. Je me suis fait dire : « Pourquoi tu t’en tiens à ce Dieu des autres… Pourquoi tu restes soumis à la religion du colonisateur qui a fait table rase des croyances de tes vrais ancêtres… Pourquoi ton intelligence reste embrigadée à répéter ce qu’on t’a appris, alors que tu as aussi le droit d’inventer ta relation à Dieu pour aller à la conquête des autres ? »

De prime abord, les questions de mon interlocuteur me semblaient si pertinentes : Indépendance et aliénation, liberté et conditionnement, religion et domination… où en suis-je ?
Ensuite, le contexte nouveau de la pandémie nous soumet tous, à égalité, à une même menace. En dehors de la cacophonie des scientifiques, à qui irions-nous ? Enfin, Dieu est-il Dieu, tous pour un, un pour tous ?

À la vérité, mon interlocuteur opérait des glissements insidieux par la malice de ce qui me semblait quelques objections pertinentes. Indéniablement, il a pu avoir confusion ou collusion entre la religion et les autres aspects de la vie politique, culturelle, morale ou économique… Est-ce pour autant que Dieu et César ne seraient plus ni souverains ni à distinguer ?
Ce qui retient notre attention, en ce XX ème dimanche du temps ordinaire, c’est le refus pour la cananéenne d’abandonner le chemin du salut, symbolisé ici par la quête de la guérison. Même aux portes de la prétendue religion d’une autre nation, dans la perspicacité, la cananéenne prosternée devant Jésus est un modèle de foi : « Oui, Seigneur, justement, les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leur maître. » Une foi humble et confiante à l’instar de celle du centurion de l’armée romaine : « Je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit… » Lc 7,6. Telle est la clef de ce qui doit nous sortir ou nous affranchir de tous complexes ou errements religieux.
Si pour la cananéenne, les « miettes » ont aussi bon goût, elles demeurent toutes aussi nourrissantes à l’instar de l’eucharistie : « A sumente non concisus, non confractus, non divisus, integer accipitur. Par celui qui le reçoit, il n’est ni coupé ni brisé, ni divisé : Il est reçu tout entier. »

La mission terrestre de Jésus confirme bien qu’Israël est le peuple élu de Dieu. On peut en être jaloux. Rejeté par les siens, l’universalité du salut offert par Jésus, rejoint quiconque met sa foi en lui. Israël peut en être jaloux. Pour ma part, je suis heureux d’être invité à la maison du Seigneur.

Ab Patrice S.